début de ce blog - 24 décembre 2008

Le divin rencontre l'humain, le céleste fait du terrestre son nid,
l'essentiel allume ses lumières aux fenêtres de l'existentiel… Une histoire de naissance !

samedi 30 mai 2009

Miracle

Les voilà de retour. Au petit matin, sur la grève, ils s’affairent à nettoyer leurs filets. Leurs efforts de la nuit ont été vains. Rien. Ils n’ont rien pris. Tous ces gestes répétés selon l’art enseigné par leurs pères, avec cette application et ce savoir-faire acquis au fil des ans. Pourtant ils rentrent bredouilles, leurs barques alourdies de la seule fatigue, et en guise de récompense la corvée. Il y a de quoi se décourager. Où est l’erreur ? À qui la faute ? Changement climatique, épuisement des ressources, pollution… les explications viennent à l’esprit, mais aucune ne fournit de quoi pallier le manque à gagner. Il faut bien vivre, bon sang. Un type s’adresse à la foule. Encore un beau parleur, comme il y en a tant en période électorale. Mais son parler interpelle ceux qui sont venus à la criée. Et il s’empare du porte-voix des pêcheurs pour mieux se faire entendre. Quel est son propos ? Il est question de la crise (tiens donc !) et puis de ce qu’elle nous invite à visiter dans nos profondeurs. Charabia. Et pourtant quelque chose interpelle.

abondance des profondeurs (merci Jean)

C’est vrai, notre manière de vivre, la croissance sans fin dans un monde fini, même les mathématiques s’y refusent. Alors il faut oser écouter. Et comprendre qu’il s’agit de jeter les filets dans d’autres eaux. Celles qui sont à l’intérieur. Celles qui nous invitent à retrouver le sens des choses, les vrais besoins, en nous éloignant des principes obsolètes de la société de consommation. Difficile rupture. Mais il suffit qu’un seul entende l’appel pour transmettre le courage à ses amis. Et voilà qu’une expérience s’annonce, bouleversante. « Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre. Mais puisque tu me dis de le faire, je jetterai les filets. » Après la nuit et ses errances s’annonce le jour des nouvelles évidences. Notre planète recèle suffisamment de ressources pour satisfaire les besoins de tous, mais elle n’en contient pas assez pour satisfaire l’avidité sans fin de quelques-uns. Cette prise de conscience pourrait nous conduire à la honte. Elle nous invite à dépasser nos peurs, pour fêter la vie et le respect de son abondance.

(libre adaptation de l’Evangile - Luc 5, 1-11)

jeudi 28 mai 2009

Silence

Sans le silence aucun son ne peut être entendu. Comme aucun mot ne peut être lu s’il n’est écrit sur une page. C’est son support. C’est la matrice d’où il émerge. C’est la lumière qui l’éclaire. Et nous avons besoin périodiquement de nous en souvenir, pour renouer avec lui, comme on efface une ardoise pour pouvoir y écrire un nouveau message.

Le problème, tous ceux qui pratiquent la méditation vous le diront, c’est que le bruit est surtout à l’intérieur. Les pensées vont et viennent, tournent et voltigent, comme les mouches autour du lustre de la chambre à coucher par un clair matin d’été. Et quand vous voulez en attraper une ce sont toutes les autres dont vous relancez l’agitation. Alors il est plus pertinent d’entrebâiller les volets et d’ouvrir les fenêtres pour qu’attirées par la lumière extérieure elles choisissent elles-mêmes la sortie. C’est ce que nous faisons en pratiquant l’assise. Yeux entr’ouverts fixés sur l’espace devant nous, portés par le simple mouvement de l’inspir et de l’expir, nous observons cette danse jusqu’à son épuisement. De là naît l’aptitude d’une nouvelle écoute, et ce que l’on entend alors est parfois révolutionnaire.

Silence au-dedans. Silence au-dehors. L’expérience est saisissante. Quand le calme est établi en nous, ce qui vient à notre rencontre ne saurait nous perturber. L’action est plus pertinente. La parole devient porteuse d’un véritable message. La pensée gagne en justesse et en profondeur. Et ce n’est pas le bruit ambiant, la vivacité d’une conversation houleuse, ou l’interminable bavardage de votre ami(e) qui vous en distraira. Sauf si vous laissez le bruit s’opposer au silence. Alors vient le besoin de clouer le bec à ce qui vous dérange. Alors vient la nécessité d’imposer la retenue à votre entourage. Mais déjà vous êtes perdu car même si votre interlocuteur modère son verbiage, votre silence n’est plus respiration. Il n’est plus accueil et offrande pour que circule la vie. Il devient barrage et défense. Verrou posé sur un cœur qui se refuse.

mardi 26 mai 2009

Tressés

Fétus de pailles en brins torsadés, en fils tressés par croisements et recroisements successifs, voilà des mains expertes du vannier l’assise réalisée, sur laquelle viendront se poser tour à tour le séant du maître de maison, celui des membres de la maisonnée, et à l’occasion de leurs hôtes. Cet objet ici si admirablement photographié par Jean, mérite qu’on s’y arrête. Car il est tout un enseignement, un rappel dont l’urgence s’impose à la folie de notre monde : rien ne serait possible sans l’étroite complicité de tous. Comment voulez-vous vous asseoir sur une paille ? Pourtant au travers de l’ingénieuse imbrication, ce qui est inaccessible pour l’un devient réalisable par l’ensemble. Et l’évidence de ce fait repose sous nos derrières, pendant que sur la table défilent plats et mets variés. Mais à l’heure du prêt à consommer qui sait encore considérer la sagesse de l’ouvrage artisanal ? L’attention nous manque, et nous glissons à la surface de ce qui pourrait être une belle leçon de choses…

L’individualisme est un pivot de notre société moderne. Il est économiquement plus rentable. Il est politiquement plus manipulable. Même religieusement je soupçonne certain d’y trouver une facilité coupable. Mais cette organisation contredit le fil de la vie. Car à bien la considérer tout y est continuité. De l’un à l’autre. De chacun à tous. Personne ne peut prétendre tirer son épingle du jeu à lui tout seul. Même le riche - que serait son argent sans les biens à acheter produits par ses frères ? Même le roi - que serait son royaume sans ses sujets qui chaque jour le font vivre ? Même le saint - son aura aurait-elle tant d’intérêt s’il n’était ses disciples pour l’aduler ? De l’humain aux animaux, des plantes aux minéraux, y compris les anges, les fées et les lutins, nous sommes tressés à l’Être. Et seul le sot pourrait croire qu’il n’en est rien. Qu’à épuiser la terre, il pourrait s’enrichir. Qu’à nier son prochain, il pourrait s’anoblir. Qu’à ignorer le tout, il pourrait gagner la partie. Mais vient le temps de retrouver l’art du vannier.

dimanche 24 mai 2009

Le feu

Je n’ai jamais vraiment eu peur du feu. Pourtant enfant mon grand frère m’a initié à un jeu risqué : tenir avec une main une allumette à la verticale de sa boîte côté grattoir, et de l’autre main donner une pichenette avec le pouce et l’index pour faire s’envoler l’allumette enflammée dans les airs. Avec cette sorte de lance-flamme, nous nous sentions guerriers… jusqu’au jour où j’ai brûlé une mèche des cheveux de ma sœur ! À 8 ans j’ai compris d’instinct que le feu demandait à être apprivoisé pour rester une expérience heureuse. Depuis j’ai allumé bien des flambées et quelques beaux brasiers, en veillant chaque fois aux justes précautions.

Le feu rassemble. Il célèbre l’intensité de la vie. Il plonge dans sa fascinante ambiance ceux qui s’en approchent. Sa puissance exalte et soulève les cœurs, pour les transporter vers la fusion. C’est l’expérience que j’ai faite tant de fois. Groupes et communautés réunis en plein air autour d’un feu de camp. L’amitié se forme sans mot dire, une sorte de solidarité-complicité qui rassemble toutes les générations, et bientôt les chants qui naissent, suivis d’une contemplation silencieuse. Il y a vraiment de la magie dans une telle expérience, celle qui manque si cruellement à nos vies aseptisées et verrouillées par trop de systèmes de sécurité.

J’ai vu aussi une voiture brûler, par l’effet d’un court-circuit. Et puis un jour la maison d’à-côté, par une cheminée mal ramonée. Le feu anéantit, jette son voile noir et âcre sur les plus beaux ouvrages, et ne laisse derrière lui que regrets et désolation. Et que dire des feux de forêt qui vous pèlent en une nuit les plus beaux massifs, réduisant la richesse et la diversité de la faune et de la flore en cendres uniformes ?… Pourtant le feu réclame sa place au centre de nos vies. Ce que nous rappelle le terme « foyer » toujours utilisé pour parler d’une famille ou d’un logement. Alors en attendant de pratiquer la ‘marche sur le feu’, peut-être s’agit-il déjà d’oser rallumer en nous la braise de l’amour et de la passion ?

lundi 18 mai 2009

Choisir

L’existence est un chemin… sur lequel se présentent de nombreux carrefours. Et à chaque croisement il nous est demandé : « Où veux-tu aller ? à gauche ? à droite ? tout droit ? ». Et de choisir une option, c’est forcément renoncer à une autre.

Lorsqu’on est jeune, on répond sans doute à la question posée : « J’irai là où le chemin me paraît le plus profitable, sur la voie qui m’offre la promesse des plus belles satisfactions ». Et cela est bien logique. Arrive le milieu de la vie, avec ses doutes et ses interrogations. Sur la base des expériences déjà vécues, on voudrait répondre avec plus de nuances : « Un chemin paraît bien, mais comment se révèlera-t-il par la suite ? ». Vient alors la vieillesse, et rattrapé par les limites qui imposent leurs restrictions, on se découvre à dire : « j’irai où il m’est encore possible d’aller ». Avec plus ou moins de sagesse.

discerner la trace...

Pour celui ou celle qui a choisi de se mettre à l’écoute de l’Essentiel et d’avancer en fonction d’autres priorités que celles de l’ego, l’affaire se complique. On comprend qu’à trop vouloir agir on s’égare aisément, mais il est aussi très délicat de percevoir distinctement le juste chemin. Il y a bien sûr l’urgence de renoncer à l’obstination et au besoin de contrôle, mais il y a aussi une passivité qui entrave la progression. Parfois la Vie écrit l’histoire. Parfois elle nous dit : « Choisis toi-même ». Pourtant toujours elle nous rappelle que la voie n’a qu’une importance relative, c’est ce qu’on y apprend qui est déterminant.

L’existence est un chemin. Il arrive qu’on préfère ne pas voir les carrefours. Ou qu’on se débrouille pour qu’il n’y en ait pas trop. Pour échapper au « Où veux-tu aller ? », et ne renoncer à rien. Et si la route s’avère galère, à qui donc revient la faute ?

samedi 16 mai 2009

Bienveillance

Il y a ma vie telle qu’elle est. Il y a ma vie telle que j’aimerais qu’elle soit. Et l’écart est plus ou moins grand selon les jours, selon les périodes, parfois simple crevasse parfois véritable gouffre. Et facilement l’impatience me gagne, quand ce n’est pas la résignation qui s’invite sournoisement… Or une autre voie est possible : elle s’appelle ‘bienveillance’.

La bienveillance offre un regard ouvert et accueillant à ce qui est. Inutile de se raconter des histoires, inutile de nier ou de refuser la réalité. Ce ne serait qu’ajouter un obstacle supplémentaire. Inutile aussi de combattre ce qui me déplaît ou m’insupporte. Ce serait y ajouter de l’énergie et finalement le renforcer. Il convient plutôt de rencontrer ce qui se présente et accepter d’entrer dans le mouvement de la transformation. Avec confiance. Avec la confiance que ce qui est juste et vrai finira toujours par émerger.

La bienveillance nourrit et protège ce que chaque être et chaque événement porte de plus beau au fond de lui, et que l’on ne sait peut-être pas encore. Elle prépare le chemin d’une éclosion, en créant un espace où l’inaccompli peut cheminer vers son accomplissement, ou l’imparfait peut évoluer vers sa perfection. Elle donne le temps nécessaire pour qu’advienne le meilleur là où l’on craignait le pire. Sa force est présence aimante qui ramène irrésistiblement à la source de toute vie, l’Espérance et l’Emerveillement.

Dans ma vie j’aimerais cultiver la bienveillance à mon égard. C’est certainement le plus difficile. Pour que par-dessus crevasses et gouffres se construisent avec patience et dans un total engagement les ponts qui me permettront de rejoindre qui je suis vraiment. Et pour que les jours où je n’y parviens pas, je laisse simplement la vie faire sa grande œuvre au travers et en moi.

lundi 11 mai 2009

Sélections

Notre attention consciente ne peut accueillir simultanément toutes les informations présentes dans la réalité. Elle est trop riche, trop complexe, trop ‘multi niveaux’. À chaque instant nous recevons de nombreuses stimulations visuelles, auditives, kinesthésiques, olfactives et gustatives, venant de l’extérieur mais aussi de l’intérieur de notre corps. Et toutes nos réponses à ces sollicitations, par l’action, l’émotion et la pensée ajoutent instantanément de nouveaux messages, qui se superposent à celles-ci dans une sorte de mouvement perpétuel. Alors parmi ce grand foisonnement, nous opérons en permanence un tri pour construire et maintenir nos représentations de la réalité. C’est le processus de sélection (voir aussi le billet Distorsions).

tout à la fois… impossible !

Les sélections sont nécessaires et incontournables pour organiser l’état de conscience. Mais elles influencent considérablement l’orientation de cette conscience. Il est donc utile d’en prendre la mesure, si l’on souhaite apprendre à ‘choisir’ sa façon de vivre. Ce matin j’ai commencé ma journée en accueillant la joie d’un beau lever de soleil. Je me suis rendu à mon travail en observant la délicieuse moue d’un enfant que sa mère câline. J’ai répondu au téléphone en retenant les quelques mots qui m’annoncent les progrès personnels d’une amie. J’aurais pu démarrer en repérant les nuages menaçants venant de l’ouest, en réagissant à la condition très modeste de la mère et de son enfant, en écoutant seulement les doutes et la détresse de mon amie.

La difficulté c’est que nos sélections sont essentiellement inconscientes. Au point que l’on déclare généralement de bonne foi : « les choses sont ainsi, la vie est ce qu’elle est, il faut faire avec ! ». Pourtant nous avons le pouvoir de trier et de guider notre attention dans un sens ou dans un autre. Et c’est un pouvoir considérable. À condition de se mettre en route, d’explorer nos habitudes et d’expérimenter d’autres options. En commençant tout petit, pour découvrir graduellement à quel point nous sommes les auteurs de nos subjectivités. Où en êtes-vous dans ce parcours ?

samedi 9 mai 2009

L'eau

Quelle expérience ! Ce matin je m’en souviens si bien. Le bassin et son eau bleue. L’odeur si pénétrante du chlore. Les sons qui se réverbèrent à l’infini. Et ce contact au sol avec le carrelage mouillé et plutôt glissant. C’étaient les bains municipaux. Un ancien établissement, une institution. De notre « école primaire des garçons » (l’autre côté était réservé à « l’école primaire des filles »), nous étions venus en bus. Toute la classe et puis l’instituteur, un homme pour lequel j’avais un profond respect. Et durant le trajet déjà cette boule au ventre. Je n’aimais pas la piscine, ni le contact avec l’eau, ni les yeux qui piquent, ni de me retrouver en maillot de bain, ni le froid en entrant, ni le froid en sortant… Et ce jour-là après toutes sortes de séances préparatoires, il était question d’aller dans le grand bassin, nager pour de vrai, en eaux profondes !

Plusieurs copains avaient déjà réalisé leur saut. Je les voyais patauger plus que nager, avec leur bouée en liège. Et j’enviais non pas leur performance, mais qu’ils aient derrière eux la dure épreuve d’y aller. L’instituteur avec sa perche en bois veillait attentivement à sécuriser ceux qui en avaient besoin, tout en laissant à chacun trouver ‘son bon moment’ pour s’élancer. Mais le mien ne venait pas. Misère. Quand j’approchais du bord, le courage se noyait dans l’immensité de la profondeur et de sa transparence. J’ai tenté de descendre par l’échelle, mais je ne parvenais pas à lâcher prise. Alors, de retour sur la margelle, il s’est soudain emparé de moi par l’arrière, et d’un geste franc m’y a jeté. Quel geste. Je m’en souviens parfaitement : « c’est là le chemin, ne cherche pas ailleurs ». J’avais 9 ans, j’ai bu la tasse, j’étais un peu furieux, mais il m’a délivré. Merci monsieur l’instituteur.

vendredi 8 mai 2009

Aller loin

Chaque jour nos chemins s’épuisent en de simples rondes, qui en y regardant bien ont des allures de ‘tour du propriétaire’. Et nous creusons si facilement les ornières dont nous devenons alors les premières victimes… Pourtant le monde est vaste. Il y a tant à parcourir, tant à découvrir. Pourquoi cette timidité ? Pourquoi cette pauvreté ?… C’est que nous vivons encore dans la peur. Et elle nous retient cette peur, comme un chien de garde tient l’intrus en respect : « tu ne passeras pas, sans goûter à mes crocs ! ». Et nous préférons ne pas passer. Ne pas risquer la blessure. Et nos rêves d’arriver sains et saufs à bon port nous empêchent de larguer les amarres. Et nous croupissons à fond de cale, entre vivres et tonneaux. Sans humer l’air du large. Sans l’ivresse des nouveaux horizons.

répondre à l’appel, incertain… (photo de Jean)

Aller loin. C’est l’élan de mon cœur d’enfant. Et porté par le vent de la curiosité, ne sachant parcourir le monde, j’ai cherché à élargir mes espaces intérieurs. Et je me suis blessé. Parfois cruellement. Mais j’ai pu échapper à quelques vieilles habitudes, transformer un peu mon regard, pour voir la vie autrement. Car il y a tant à explorer, tant d’étonnements à traverser. Et chaque jour la question m’est posée : « veux-tu croquer l’aujourd’hui, goûter encore la confiance ? ». Et ma réponse rencontre la réticence, qui l’invite au comptoir de l’hésitation. Et ensemble elles préfèreraient refaire le monde, sans quitter le cercle clos de leurs certitudes. Quitte à désespérer de tout et de l’autre qui toujours empêchent mes rêves. Mais c’est se mentir. Pour ne pas accueillir les nouveaux horizons.

mardi 5 mai 2009

Le lien

L’être humain n’est pas fait pour vivre seul. Il ne pourrait que très difficilement survivre. Son existence s’inscrit donc dans des liens qui lui permettent d’organiser sa protection, son alimentation, son éducation, sa vie affective, son travail, ses loisirs… et tout ce qui fait partie de son quotidien. Mais parmi ces liens il y en a deux sortes, et de les confondre le conduit souvent à des impasses.

Il y a d’abord le lien de sang. C’est un lien obligatoire, qui ne se discute pas, qui repose sur la biologie, que rien ne peut remettre en cause, qui durera toujours. Il nous libère du fardeau d’ajuster nos affinités, mais nous impose la contrainte de faire avec ce qu’est l’autre. Il est un refuge, même s’il n’est pas nourri par des échanges vivants, car il a le mérite d’être inaliénable. Il est incarné par les parents, les frères et sœurs, et les enfants.

signe d’alliance entre terre et ciel

Il y a ensuite le lien d’alliance. C’est un lien choisi, que l’on décide, qui repose sur le consentement, que tous les aléas de la vie peuvent sans cesse remettre en cause, qui dure autant que dure l’engagement. Il nous offre la liberté du partenaire, mais nous inflige le difficile exercice de la responsabilité. Il est porteur des plus belles promesses et opportunités, car il se construit par la motivation à défendre des intérêts communs. Le modèle en est le couple, et puis tout le cercle des amis.

Mais voilà, nous passons une grande partie de notre vie, à vouloir que les liens de sang soient des liens d’alliance, et inversement. Combien d’entre-nous s’efforcent d’apprécier leurs parents ? Combien ont voulu rendre le mariage indissoluble ? Combien contestent la paternité ? Combien se sentent victimes de leurs amis ? Remettons les pendules à l’heure !… Ce qui n’empêche pas le très bel exercice qui consiste à choisir ce qu’on subit, et à persévérer définitivement dans l’engagement qui a été pris.

lundi 4 mai 2009

Convergence

L’internet c’est bien. La rencontre dans le concret c’est mieux !

Alors j’ai rêvé d’une possibilité de se retrouver pour vivre durant un temps avec vous ce que je propose ici. Un certain regard sur nos vies, une certaine approche de la Vie. Ça vous tente ?

Durant l’hiver j’ai découvert de blog en blog le projet de Pascale et de sa sœur. Aménager un gîte dans un écrin de nature au cœur du massif des Bauges (entre Annecy, Aix-les-Bains, Chambéry et Albertville). Un lieu que lui a confié la Vie et dans lequel elle s’apprête à accueillir des groupes. Pour partager l’émerveillement et l’amitié, pour vivre l’écoute et la beauté.

Et puis est venue Isabelle. Fidèle lectrice de ce blog. Avec son expérience des rochers et des arbres, du vent et des oiseaux. Partie dans les montagnes il y a 8 ans, elle a compris qu’il était temps d’en redescendre pour transmettre son expérience. Une très belle et grande expérience de la Vie. Celle dont nous avons tous besoin pour nous souvenir de qui nous sommes.

Alors j’ai lancé la proposition. Isabelle a dit ‘oui’. Nous avons contacté Pascale. Elle a dit ‘mais oui’ ! Et voilà que nous sommes en mesure de vous annoncer une rencontre pour l’été en trois étapes :

Déchiffrer l’Écriture de nos vies du samedi 8 août (17h) au mercredi 12 août (14h)

Mélusine, ou l’art de célébrer le Mystère et son Secret du jeudi 13 août (17h) au lundi 17 août (14h)

et la possibilité de rester sur place quelques jours supplémentaires pour celles et ceux qui le souhaiteraient jusqu’au samedi 22 août (12h).

Elle est pas belle la Vie ? Vous pouvez vous inscrire pour une, deux ou trois étapes. Les repas bio seront proposés par Marie-Pierre, une amie de Pascale. Le gîte peut recevoir 10 participants (en chambre de 3-4 ou sous votre tente). Alors ne tardez pas trop… 

Et je veux souligner ici que si l’internet conduit aujourd’hui à une telle convergence, c’est parce que les cœurs sont et restent dans la convergence à l’Essentiel. Vous le comprendrez vraiment en venant partager avec nous cette rencontre dans le concret. À bientôt.

dimanche 3 mai 2009

Connaissance

Une amie m’écrit : « Voilà ce qui s’est passé aujourd'hui : mes filles et quelques-unes de leurs copines ont trouvé un sphinx du tilleul et m'ont posé quelques questions sur les papillons de nuits. C'est là que ma ‘grande’ m’indique que deux enfants de son école s'amusent à écraser les papillons à coup de cailloux et me demande pourquoi ils font ça. Je lui réponds que lorsque certaines personnes ne connaissent pas quelque chose ils en ont peur et le détruisent au lieu d'essayer de le découvrir. Nous avons alors trouvé un endroit tranquille pour le papillon. Quelques minutes après, un jeune garçon qui jouait par là est venu l'écraser avec un caillou… Douloureux moment pour moi que de passer de l'émerveillement de ces petites filles si attentives à la vie, à la vision de ce jeune garçon détruisant avec autant de facilité non seulement la vie, mais aussi le respect de ces fillettes envers cet insecte. C'est probablement très anodin, et pourtant pour moi c'est terrible, un résumé de l'humanité. »

mystère d’une forme de présence

Ce partage m’a beaucoup touché. Et j’ai réfléchi. L’idée d’une humanité méchante -surtout incarnée par des enfants- me dérange. Et j’ai pensé au réveil, un vrai qui faisait tic-tac, que j’ai voulu un jour démonter pour explorer son fonctionnement. Et puis impossible de le remonter ! La connaissance comporte deux voies : celle de l’analyse et de la dissection, et celle de la rencontre et de l’émerveillement (voir le billet Rencontre). Depuis trois siècles notre société a mis l’accent sur la première. Jusqu’à découper l’atome, jusqu’à segmenter les chaînes de l’ADN pour tenter de les recombiner d’une façon nouvelle. Et cela nous a permis des progrès technologiques fabuleux. Qui pourrait refuser d’un bloc toutes ces avancées et le confort de vie qu’il a engendré ? Pourtant nous en voyons de mieux en mieux tous les excès, lorsque connaissance rime avec destruction. Alors il est temps de rééquilibrer ces deux voies, et de renouer avec la beauté et l’étonnement, sans rejeter la science et la compréhension. Et que les filles donnent la main aux garçons pour s’encourager mutuellement à trouver la voie d’une plus juste connaissance.

vendredi 1 mai 2009

Donner

Donner est une autre ‘gestuelle’ de la vie relationnelle (voir le billet Demander). Elle comporte elle aussi bien des complications et des risques. Car en donnant on peut empêcher l’autre de venir à nous, on peut l’écraser par l’ascendant que prend le ‘riche’ sur le ‘pauvre’, on peut alimenter une forme de dépendance, même générer une soumission insupportable. Et le don au lieu d’être la libre expression d’une joyeuse abondance de la vie, devient alors le fardeau d’une dette qui n’ose s’avouer. Dommage ! Pourtant dans cette relation je ne peux décider tout seul de la valeur de mon geste.

Donner participe de ce point de vue aux déséquilibres qui alimentent les mouvements de la vie. Une façon de provoquer l’histoire. Celle qui s’écrit au quotidien, entre deux ou plusieurs êtres. Et l’on sait que sa fonction est de nous enseigner, de nous guider vers une plus grande conscience. Il convient donc d’avancer les yeux ouverts. De renoncer à la naïveté qui nous pousse à croire que le don serait vierge de toute ambiguïté. Et d’en assumer les conséquences.

Mais donner c’est aussi oser considérer l’autre assez grand et solide pour recevoir. Je le vois, je le sais, plus vaste et plus ouvert qu’il ne l’imagine lui-même. Et par mon élan vers lui, je contribue à révéler sa pleine stature. Qui n’a pas vécu un jour ou l’autre cet ‘anoblissement’ que produit le don inattendu, inespéré ? J’ai des souvenirs précis de situations où l’offrande qui m’a été faite m’a entraîné vers une croissance qui me paraissait ne pas être qu’intérieure : manifestement je venais de grandir de quelques centimètres ! Mais pour vivre cela j’ai besoin de la grâce de savoir accueillir…